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Un tour du Circuit des 24 Heures du Mans en Ford Mustang

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Un tour du Circuit des 24 Heures du Mans en Ford Mustang

Des années… Des années… Et encore des années que je vais au Mans, que je longe le circuit, que je passe des nuits devant des écrans qui affichent des temps. Des années que j’ai l’impression de connaître chaque recoin du circuit, sans jamais y avoir posé les roues !

En y repensant, c’est assez fou. J’accumule les licences de sport automobile depuis quinze ans et mes seuls faits d’armes en tant que pilotes dans des compétitions officielles sont issus de titres de participation basiques. Mes licences sont explicitement marquées MEDIA. Mon domaine reste la salle de presse, le paddock, l’intérieur des camions des équipes, les stands. Toujours se tenir loin des baquets, des volants ou des casques, sauf quand il faut les porter pour « ses » pilotes.

Le Mans, je connais. Des heures devant les écrans, pendant les courses. Des heures de caméras embarquées et même une victoire aux 24 Heures du Mans sur la PlayStation 3 (une folie d’adolescent !). C’est dire si je connais.

La montée après la ligne droite, le Dunlop, la descente, les S de la forêt, le Tertre, les Hunaudières… Ah les Hunaudières où il faut emmener du frein loin dans les ralentisseurs et soigner la sortie. Mulsanne, Indianapolis, mon premier plus grand souvenir de sport automobile avec les Bentley de 2002 ! Arnage, les Porsche, le Raccordement… Je connais.

Je connais, mais je n’y connais rien !

Et si on me confiait une voiture pour faire un tour du Circuit des 24 Heures du Mans, pendant Le Mans Classic, avec plus de 120 000 spectateurs sur le site ? J’avoue que la question m’excite. Une Ferrari 250 LM ? Ford GT40 ? La Porsche 911 GT1 que j’ai vu rouler il y a deux semaines à Zandvoort ? La Toyota GT-One (pardon TS020) ? La Porsche 919 Hybrid ? En réfléchir, peut-être l’une de nouvelles LM P3 : assez fou pour être un vrai proto de course, mais aux performances à la prise en main plus accessible.

Et là, vraiment, on veut me confier le volant d’une voiture pour faire le tour du circuit, avec les 120 000 personnes autour. Ce sera une Ford Mustang… Pas grave, je prends tout ce qui passe ! Je crois que je l’aurais même fait sur un vélo.

Mais une Mustang ? Pour faire l’idiot sur le Maison Blanche, c’est parfait. Mais emmener une Ford Mustang sur le grand circuit. La Mustang dans les S de la Forêt, le Terte, les Porsche ? C’était oublier que certains l’avaient fait, quand on s’inscrivait au Mans avec d’autres considérations. C’était en 1967 avec une Shelby (abandon) et en 1997 avec une Saleen (double abandon).

En position : le long capot cache le 4 cylindres EcoBoost de 2,3 litres gavé d’un turbo pour afficher 317 chevaux et 432 Nm de couple à 2 500 tours/minute. Le tout pour 1 655 kg…

Casqué, rendez-vous dans les stands en attendant que la course 1 du plateau 4 de Le Mans Classic se termine. Feu vert ! Sortie des stands à moins de 60 km/h et hop j’y suis !

Freinage à 150 mètres

Ma Mustang n’est pas une GT. Pas le gros son du V8, mais la mélodie du 4 cylindres m’enchante. C’est le gros point fort sur circuit, on peut laisser la cavalerie respirer. Boîte manuelle, ça monte jusqu’au Dunlop. Premier freinage, je viens prendre le vibreur à gauche, à droite, réaccélération… Mais que c’est large à la sortie ! J’aurais pu en remettre trois fois plus tôt, trois fois plus fort. La descente. Je commence à détester ! Je n’ai pas de repère de freinage, j’attaque tôt le pédale, trop tôt. J’ai l’impression de patienter et de chercher la trajectoire. Puis arrive le Tertre Rouge. Je sais que ce n’est pas un virage, c’est un coude, un casse vitesse. Je l’aborde et je repense à la sortie de piste de l’une de mes voitures il y a quelques années, quelques heures après le drame de Simonsen. Refroidi.

Enfin, les Hunaudières. Cette partie, je l’ai faite à pied, en voiture, mais jamais en condition de course. 3e, 4e, 5e… Un coup d’œil aux compteurs, 6 500 tours et 220 km/h. Je me souviens d’une consigne passée au moment de monter dans la voiture : freiner à 300 mètres. Ils doivent vraiment vouloir assurer, je suis sûr que ça passe à 150 mètres !

Mais comme je suis particulièrement consciencieux, je lève juste avant le panneau et je tape les freins à 300 mètres. Ouh, ça bouge de l’arrière, la Mustang se dandine gentiment, mais ça freine. Ça freine tellement que je me trouve en confiance. Les Focus RS parties devant moi sont au ralenti dans la chicane, je relève un peu mon pied de la pédale centrale pour aller les chercher… Bêtise !

Quand on te dit de freiner à 300 mètres, c’est pour freiner longtemps, pas pour faire le malin. Quand j’arrive à mon point de braquage, je suis un peu vite et un peu lourd. L’avantage d’un tel circuit (surtout cette portion), c’est qu’il y a de la place pour les débutants ou les faux pilotes en perditions. Je grimpe sur le vibreur à gauche et c’est reparti. Promis, je freine bien à 300 mètres pour la deuxième chicane. Là, je veux réaccélérer encore plus tôt. Bien en ligne, tout passe.

Arrive Mulsanne. Je sais qu’il y a un piège. Il ne faut pas freiner pour le 90 droite, mais avant le léger droite. Tu parles ! Le panneau 300 mètres est bien avant la mini courbe. Je freine fort… Et là, franchement, ça freinait beaucoup plus tard !

Même Mulsanne, je passe en 3e. Tout au long du circuit, je n’ai jamais passé la 2. Par choix d’abord, pour ne pas jouer sur la réaccélération de la propulsion alors qu’il y a du monde en piste, et parce que je n’en ai pas senti le besoin.

L’arrivée vers Indianapolis. Je ne sens pas le banking en étant plus bien à l’intérieur, mais je peux en remettre avant le gauche. Gros vibreur à la corde, encore à l’extérieur. À Arnage, je freine tard, tard, vibreur et encore large en sortie. Là, on voit qu’il y a eu les 24 Heures du Mans il y a trois semaines. La piste a été considérablement élargie par les milliers de passages.

Maintenant, ça n’a plus rien à voir… Je sais que les Virages Porsche sont un très gros morceau de sport automobile. Je l’ai toujours entendu. À une époque, je me suis même demandé si le petit monde des pilotes n’en faisait pas des tonnes à propos de ce passage aussi « délicat ». Et les récents énormes accidents n’ont fait que rappeler que c’est bien compliqué et vraiment dangereux.

J’entends les pneus s’exprimer dans le droite, bonheur ! Ah le gauche… Mais que c’est étroit avec ce mur bleu tout le long. Je m’imagine en pleine nuit, au 24 Heures du Mans, au volant d’une LM P2 en train de revenir sur une LM GTE-AM en apercevant une LM P1 dans le rétro. Quel stress de devoir trouver sa voie pendant qu’un tank de 1 000 chevaux a décidé de tout bousculer pour passer le plus vite possible.

Vraiment, j’aurais du mal à dépasser à cet endroit. Et pourtant, la piste est propre. Aux 24 Heures, il y a des rails avec du gravier et de la gomme partout hors trajectoire.

Arrivée sur le Karting, drapeau jaune ! C’est juste pour nous rappeler que le tour de manège est terminé, il n’y aura pas d’escalade de vibreurs au raccordement et c’est la fin des vocalises pour les 4 cylindres… Et là, un petit malin dépasse avec sa Focus ST. Drapeau jaune ! En voilà un qui n’est pas prêt d’avoir sa licence (de pilote).

Author: Rédaction

Rédaction AUTOcult.fr



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