Je retiens mes larmes. C’était devenu une fatalité. Ton père Philippe avait répété que tu n’aurais pas voulu vivre sans pouvoir conduire, piloter. Il semblait qu’il n’en était plus question. Tout s’est donc arrêté à Suzuka.
Nous avions eu l’occasion de nous voir en World Series by Renault… Je garde à l’esprit le premier virage de Barcelone à cinq ou six tours de l’arrivée. Le dépassement sur Frijns (j’oublie ce qu’il s’est passé deux virages plus loin !).
Ce n’est pas le premier décès d’un pilote. J’en ai vécu très directement… Mon premier, celui d’Alex Jacopini, je l’ai même annoncé par communiqué. Le dernier, c’était Alan Simonsen, il y a deux ans, au Mans.
Je n’étais pas à Suzuka. Mais, comme pour chaque Grand Prix, j’étais devant l’écran. J’ai bien cru que ça passerait. J’y ai cru durant des minutes, des heures, des jours. On en parlait avec tout le monde, du plus simple fan de F1 aux personnes les plus impliquées… Gil Leon avait vu ton père avant que je n’aille à Monaco pour disputer le Rallye ZENN. J’avais fait cette course en te gardant dans un coin de ma tête, mais l’optimisme n’était déjà plus.
Tout ceci est bien prématuré. Nous voulions tous te voir dans la Ferrari, pleurer devant le podium pour fêter ta première victoire…
Pour finir sur une note débile : tu succèdes à Ayrton Senna… On te l’avait déjà faite celle-là dans ta carrière ? Et tout ça, vingt ans, jour pour jour, après Juan Manuel Fangio !
F1Jules Bianchi